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Philologie d'Orient et d'Occident
13 août 2013

Le Tôhoku (12) Instances d'écriture (2)

Philologie d'Orient et d'Occident (240)

                             Le 13/08/2013, Tokyo    K.

                       Histoire et instances d'écriture (2)   Le Tôhoku (12)

 

                                               アップリケ 花火(岐阜新聞)

Feux d'artifice à Nagara-gawa par Misao Wada

 

    Fusô-ryakuki est une des chroniques en chinois classique, publiée officieusement deux cents ans après la publication des Annales des trois règnes  (Sandai-jitsuroku,901, cf. billet 126). Sandai-jitsuroku, la dernière et la plus perfectionnée des six chroniques officielles (Rikkokushi), assurait des informations détaillées sur la période limitée des trois empereurs Seiwa, Yôzei et Kôkô, entre 858 et 887.

   Compilée par un bonze, Fusô-ryakuki aurait été publiée après l'année 1104. Le dernier récit s'arrête en 1094 au moment de l'empereur Horikawa (règne 1087-1107). Elle relate, en résumé, événements divers et nécrologies des personnages illustres, dans l'ambiance généralement bouddhique, depuis le premier empereur légendaire Jimmu (cf. billet 135) jusqu'au règne du 73e empereur Horikawa. Comme document historique, sa valeur aurait été plus grande si cette chronique avait été conservée dans son état original. Sur les 30 volumes originaux, il n'en est resté que 16. Manquent les volumes 1, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19. 

   Comme l'indique le titre (ryakuki 略記: sommaire), la description des événements de Fusô-ryakuki est généralement sobre, d'autant plus qu'elle est écrite en un chinois concis. Les anciens articles (surtout des Rikkokushi) qu'on transmettait dans le sommaire auraient été rapportés et ressassés suivant les idées du scribe bouddhiste. On peut facilement imaginer que les omissions se faisaient avec des intentions aussi clairement impérialistes que centralisatrices, comme on le voyait bien dans le premier document écrit en japonais mana (= kanji, cf. billet 126) au début du VIIIe siècle qu'est le kojiki 古事記 (cf. billet 145). Ainsi continuait de se consolider l'empire.

   Les deux tiers des volumes Fusô-ryakuki devaient rendre compte des époques décrites dans les Rikkokushi. Cet ouvrage compact, quoiqu'en 30 volumes, aurait au moins dispensé, à l'époque de Heian, les étudiants du centre (bonzes, clercs, de jeunes futurs fonctionnaires, etc.) de tout retenir des Rikkokushi en 190 volumes, écrits politiques, religieux ainsi que juridiques de l'empire: Nihon-shoki 日本書紀 (en 30 vols), Shoku-nihongi 続日本紀 (40), Nihon-kôki 日本後紀 (40), Shoku-nihon-kôki 続日本後紀 (20), Montoku-jitsuroku 文徳実録 (10) et Sandai-jitsuroku 三代実録 (50).

   Comme relation écrite des événements antérieurs à l'année 887, Fusô-ryakuki, qui n'est essentiellement que leurs résumés, n'a pratiquement rien appris de nouveau, sauf quelques interprétations des faits du point de vue bouddhique, ou des références religieuses nouvelles mais inoffensives, car le bouddhisme était depuis belle lurette religion de l'Ètat.

   Enlever, à l'écriture, des descriptions qui n'étaient pas du goût de l'État ou qui pouvaient lui nuire, choisir des faits anodins ou en inventer au besoin, et ceci sans aucun état d'âme, voici comment on procéda par élimination à la consolidation de l'empire.

   On a déjà fait mention d'une éruption volcanique qui aurait été gigantesque dans le nord du Tôhoku en 915 et dont aurait résulté l'apparition du lac Towada dans son aspect actuel (cf. billets 231, 234).

915: Le 13 juillet: 出羽国言上雨灰高二寸諸郷農桑枯損之由 dewa-koku kotoage: uhai-no takasa nisun, shogô-no nôsô koson-no yoshi «Selon rapports du pays de Dewa: boue de cendres, épaisse de deux pouces. Dans tout le pays, mûriers des paysans flétris perdus» (Mozume Takami: Fusô-Ryakuki, en marge du vol 23, coll. Sintyû-Kôgaku, vol 6, 1927, Tokyo, Kôbunko, p. 246).

   Il s'agit d'une seule allusion (et en marge!), de tous les anciens écrits, à l'éruption du volcan Towada qui eut lieu un demi-siècle après la catastrophe du Mont Fuji (cf. billet 123). Dans son explosion le Towada aurait dévasté, selon un volcanologue (hayakawayukio.jp/catalog/2k/9906/text.html), la grande partie nord du Tohoku. Pour que la terre ait été recouverte d'une boue de cendres épaisse de 6 centimètres, il fallait effectivement qu'eût eu lieu une immense coulée pyroclastique dont rendraient compte les couches de pierres ponces de ma ville natale (cf. billet 234). La catastrophe du nord était réelle tandis que le désastre était quasi inexistant pour les gens de Kyoto. (À suivre)

 

 

 

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