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Philologie d'Orient et d'Occident
21 avril 2010

La phonologie chinoise à l'époque du Shī-jīng 詩経 (2)

Philologie d'Orient et d'Occident (20)   Le 21/04/2010, Tokyo K.

La phonologie chinoise à l'époque du Shī-jīng 詩経 (2)

 

     Consonnes primitives : il y en a cinq catégories. Les exemples principaux sont entre parenthèses : labiales (p, p', b, m) ; linguales (t, t', d, n, l) ; dentales (ts, ts', dz, s) ; gutturales (k, k', g, ng) : laryngales-glottales ( · , h, ɦ).

     On voit que l'analyse des rimes anciennes n'était pas allée jusqu'à la formation de l'idée de phonèmes à l'indo-européenne. Les consonnes étaient analysables à peu près dans les mêmes normes que celles de l'indo-européen, tandis que les voyelles proprement dites (dans le sens indo-européen) n'étaient que des éléments constitutifs des groupes vocaliques dont la fonction principale était, selon les grammairiens chinois postérieurs dont le Dr Tôdô se nourrit pour son dictionnaire, de faire rimer les phrases poétiques. L'analyse chinoise s'est contentée de décrire les relations entre le sémantème et le morphème (toujours en rapport avec le son) : deux éléments constitutifs de l'écriture chinoise.

     Le kanji en kan-on japonais « baie, fleuve »  est constitué du sémantème 氵« eau » et du son-morphème 工 . Gyo (kan-on japonais) 漁 « la pêche, pêcher », également du sémantème氵« eau » et du son-morphème 魚 ngiag - ngio « poisson ». Selon le Dr Tôdô, plus de 80 % des kanji sont de la catégorie de formation « sémantème + son-morphème ». L'analyse phonétique sus-dite a fait état des conditions prosodiques de l'époque où ce genre de formation des kanji était une pratique courante. Elle rendait compte non pas des phonèmes à l'occidentale mais des fonctions phonologiques assumées par l'ensemble des groupes son-morphèmes.
     La prosodie concrétisée dans le Shī-jīng reflétait la réalité de la création de l'écriture chinoise. Le système d'idéogrammes eut pour résultat de définir pour longtemps les caractéristiques de la langue chinoise.

     Pour décrire la phonologie du chinois ancien (vers trois mille ans B. P.), les Chinois du XlVe siècle qui commençaient à étudier la matière n'ont pas eu recours au siddham* mais à leur propre écriture idéographique, peu conforme à la notation phonologique. Cette limite méthodologique les a empêchés d'aboutir à la découverte des phonèmes à l'occidentale tout en leur permettant de sauvegarder l'intégrité de la langue chinoise. Il s'agissait non pas de pousser l'analyse jusqu'aux plus petites unités phoniques mais de regrouper les éléments selon certaines fonctions pratiques tout en négligeant les différences infimes ou insignifiantes. L'important était de faire de beaux vers qui forment l'esprit.

    Je fais ces notes philologiques au Japon, à Hida-Takayama, une ancienne ville pittoresque entourée de grandes montagnes, au moment où se prépare la grande fête du printemps. Les habitants de la ville s'affairent à organiser l'événement : sortir du grenier communal leur grand char, le monter, le décorer, entraîner un groupe de petits fifres. Il y aura beaucoup de touristes dans la ville. Cette année, une équipe de télé française (pour la chaîne « Voyages ») est venue filmer les préparatifs de la festivité. Les gens du quartier de tous états s'activent pour toutes sortes de travaux minutieux que nécessite l'occasion. Cette animation, attirant les gens de l'extérieur, regroupe ceux de l'intérieur et engendre parmi eux une atmosphère toute conviviale. La fête, c'est un déclic pour la paix communale.
    L'esprit qui anime les habitants de Takayama confine à celui des savants Chinois du XlVe siècle qui cherchaient, à travers leur travail ingrat, le bien-fondé de la structure logique de leur langue.
(A suivre)

*L'étude de l'écriture indienne a commencé en Chine au début du Vlle siècle. L'introduction de cette écriture sainte au Japon se fit au Vllle siècle non pas par l'intermédiaire de la Chine mais directement de l'Inde du sud.

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