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Philologie d'Orient et d'Occident
4 septembre 2021

Le fer à Sannaï-Maruyama (3)

Philologie d'Orient et d'Occident (482) : le 04/09, 21 Tokyo, Kudo.S

Le fer et le substitut de fer à Sannaï-Maruyama (3)

 Absence de preuve n'est pas preuve de l'absence

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Encensoir de fer de Nambu (Aïchi Inuyama, Restaurant Minato, photo par Yoshiko I)

 

   Dans la langue japonaise, les particules importantes des cas sujet et régime (génitif, nominatif, accusatif) tels que na, no, ga, ha, wa et wo (o), enracinées dans l’esprit, se passent souvent d’exposant patent. Par contre, les obliques tels que: to (avec), ni (à), he (vers) doivent s’appuyer sur la présence réelle.

   Le site japonais du nord (Sannaï-Maruyama) ne serait-il pas en lien avec les grandes civilisations occidentales de la même époque ? Si oui, par quelle(s) route(s) cela aurait-il été possible? C'est ce que nous nous sommes demandé à la fin du billet dernier (481) au sujet de la présence éventuelle du fer sur le site Sannaï-Maruyama. On n’en a trouvé aucune trace dans les fouilles.

   Les immenses bâtiments en bois qu’on imagine à partir de six énormes piliers (tous faisant un mètre de rayon) font soupçonner que le charpentier avait dû réclamer des outils suffisamment durs et aigus pour pratiquer tenons, mortaises ou rainures pour tenir l’ossature.

   Les objets ou fragments d'émeraude, d'opale, de quartz, cristal de roche, ou d'obsidienne, qui ont été retrouvés dans les fouilles, fragiles et menus, n'auraient pu être utilisés pour un bâtiment si imposant.

   On ne trouve pourtant pas l'ombre du fragment de métal, ni cuivre ni fer sur ce site vieux de cinq mille ans. On a évoqué en Occident le fer météorique, mais il n'aurait pas été employé à Sannaï dans des constructions telles qu’il y en avait en Égypte antique ou chez les Hittites, berceau du fer industriel. À Sannaï, l’art de fondre le fer était inconnu.

  Dans son livre de 1974, l’historien et archéologue Mori Kôichi, définit chronologiquement le fer de fonte (cf. billet 481). Nos premières forges auraient été mises en place dans les montagnes boisées du sud-ouest de Honshû, dès le début de l’âge de Yayoï. Cela signifie que le début de métallurgie correspondait au moment où s’introduisit dans le pays la culture de riz, c’est-à-dire, vers trois mille cinq cents ans B. P.

   L’historien Mori pense manifestement à la culture de riz en rizières plates, en nappes d’eau nivelées à égalité ou étagées sur les terrasses dans les montagnes.

  Or, à Sannaï-Maruyama, antérieur de deux milliers d’années aux sites de la période Jômon tardive du sud-ouest, a pu exister le riz (type japonica en provenande de Chine du sud). Ce serait un anachronisme d’imaginer que des grains de riz, même si trouvés à Sannaï, étaient du sud-ouest de l’archipel. Car le site du nord est beaucoup plus ancien que celui de Kyûshû. À Sannaï-Maruyama, les graines pouvaient être laissées (non pas semées) sans soins spéciaux dans les terrains vagues parfois brûlés de manière saisonnière, en écobuage. Les rizières en question n’étaient pas irriguées mais en pleine terre. En ce qui concerne la riziculture, l'écart entre Kyûshû et Sannaï aussi chronologique que méthodologique, est considérable.

   Préparer les rizières nécessita un travail collectif et surtout les outils agricoles, houes, pioches ou bêches, pour ameublir le terrain. Ni les pierres (sans parler des bijoux comme le quartz, l'opale ou l'émeraude) ni les obsidiennes ne purent être matériaux des outils agricoles. Se fit donc sentir le besoin d’une matière plus dure, qui ne s’use pas, exploitable comme le cuivre ou le fer. Depuis l’âge Yayoï, le sud-ouest put fournir les limailles de fer aux forges. Par contre Sannaï-Maruyama devait disposer des scories volcaniques.

   Quand Sannaï-Maruyama était en activité, les volcans voisins étaient aussi bien vivants. Le volcan Towada, était entré depuis une dizaine de milliers d’années en période d’activité et l’eau dans le cratère forma le grand lac qu’on voit actuellement. Le volcan vomit laves et projections dont profitèrent, bien après, plusieurs villes, dont Kosaka (cf. billet 424) connue par son immense mine de cuivre à découvert. Or, le site de Sannaï-Maruyama fut un certain temps exposé à une intense activité volcanique sous la chaîne de Hakkôda.

    ... ...

   Murakami Einosuke, contributeur important à l’ouvrage de Mori Kôichi, fit partir de la Mésopotamie en pleine prospérité le cuivre et le fer vers la Chine. C’est à notre tour d’imaginer deux itinéraires des métaux: l’un passant par le nord vers le bassin du fleuve Jaune ; l’autre par le sud, dans la vallée du Yang-Tseu-Kiang dont l’aire d’influence devait se lier avec Sannaï-Maruyama. Le site nippon ne put se développer au même rythme ni au même niveau qu’en Chine. En revanche, il pouvait profiter de ce qu’aucune autre civilisation antique ne pouvait espérer : scories ferrugineuses en provenance des volcans.    (À suivre)

 

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