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Philologie d'Orient et d'Occident
15 octobre 2013

Le Tôhoku (21) - Le nord-est conte l'empire (5)

 

Philologie d'Orient et d'Occident (249)
                                    Le 15/10/2013,  Tokyo    K.

Isé-Jingû, temple-bastion de la conquête de l'Est

                           Le nord-est contre l'empire (5)      Le Tôhoku (21)

                                           001120

                                                            Crabe par Misao Wada

 

   J'essaie de rendre en français un article de la presse concernant la bougeotte de tous les 20 ans de l'âme Amaterasu (le quotidien Maïnichi le 3 octobre 2013).

    «La cérémonie se déroule tous les 20 ans dans la ville d'Isé (dépt. Mié). La pose de la relique de la divinité Amaterasu dans une nouvelle demeure de l'enceinte s'est effectuée le soir 2 octobre. Il s'agit du moment culminant d'une série de festivités qui ont duré 8 ans. Dans la profonde sérénité propre à la haute futaie enveloppée d'épaisses ténèbres, on a procédé à la cérémonie antique dans le silence complet. Ainsi a été accompli sans encombre le «déménagement» du dieu. L'emménagement du Gekû (cf. billet 248) aura lieu le 5 octobre au soir.

   Juste avant 20 heures, on éteignit toutes les lumières devant les deux sanctuaires: le nouveau et l'ancien. Au signal du cri trois fois répété «ka-ke-kô», imité du chant du coq, émis par un prêtre shintoïste, ils ont fait leur apparition, du vieux temple: Kuroda Sayako (44 ans), ancienne princesse impériale et officiante extraordinaire et Takatsukasa Naotake, grand ministre du culte, suivis d'un cortège (Togyo-gyoretsu 渡御御列) composé de plus d'une centaine de prêtres en habits traditionnels de la fête.

   Au milieu de la procession plusieurs prêtres soutenaient la relique sacrée: Yata-kagami 八咫鏡 (cf. billet 248) enveloppée dans une étoffe de soie appelée Kin-gai 絹垣 «haie de soie». Précédé par les porteurs de torches, le cortège s'est acheminé lentement pendant environ 20 minutes, pour s'éclipser enfin vers le nouvel édifice, construit du côté ouest de l'ancien sanctuaire. L'objet sacré fut déposé dans le nouveau. Ainsi fut close la cérémonie.

   Le transfert de l'âme Amaterasu qui avait eu lieu pour la première fois la 4e année de l'impératrice Jitô (en 690) venait de marquer sa 62e célébration. Environ trois mille invités ont observé la séance nocturne depuis les gradins.» (article signé par Taniguchi et Arai).

   Le quotidien Tokyo du 3 octobre produit plusieurs photos de l'événement célébré la veille, dans l'une desquelles on voyait Akishino Miya, le second prince impérial, assister à la cérémonie. Un autre article dit que l'empereur actuel, Akihito, résidant au palais impérial de Tokyo, faisait une révérence vers l'ouest, c'est-à-dire, vers Isé située à 400 km de la capitale.

   D'après une autre rubrique de la presse (le quotidien Tokyo du 3 octobre), Abe Shinzô, aux propos droitiers, assistait à la cérémonie accompagnée de ses membres de cabinet. C'était la première fois qu'un premier ministre était présent depuis 1929, quand Hamaguchi Osachi (1870-1931), antimilitariste, médiocre économiste, mort assassiné, s'y est rendu à la même occasion.

   La visite de Abe au temple bastion de la conquête de l'Est lui a attiré quelques commentaires, voire des quolibets de la part des rigoristes qui ne voulaient pas voir le haut fonctionnaire flirter avec le culte de la famille impériale. Dans le même quotidien, Hirano Takeshi, professeur émérite, spécialiste de la Constitution et des droits religieux, affirme que la présence du premier ministre dans la grande cérémonie du sanctuaire, qui n'est qu'un lieu de culte, risquerait de faire croire au public que le temple est une institution particulière. En tant que premier ministre il aurait dû se passer d'y assister, dit doctement l'universitaire de Kyoto.

   Si le premier ministre était de la famille impériale, il aurait pu s'éviter des critiques. Ce qui est pourtant impossible, car la Constitution moderne interdit à la famille de s'immiscer dans la politique. Être de la famille impériale revient à ne pas être homme politique.

   C'est le 40e empereur Tenmu (? - 686) qui fit d'Isé le temple de l'empire (cf. billet 247). C'est sa femme-nièce, l'impératrice Jitô, qui inaugura en 690, 18 ans après la victoire de son mari-oncle, empereur Tenmu, vainqueur des troubles de Jinshin, cette curieuse pratique qui allait se réitérer tous les 20 ans dans l'enceinte du temple Isé.  (À suivre)

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