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Philologie d'Orient et d'Occident
24 juillet 2021

Combustible de la forge (2)

Philologie d'Orient et d'Occident (479) : le 24/07/21   Tokyo, Kudo.S

Fonte de fer (3) en Orient et en Occident 

Sannaï-Maruyama, site extra : l'archipel Nippon avant la riziculture

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Inuyama, pays de verdure (dépt. Gifu: photo par Yoshiko I.)

 

   Dans les billets précédents (cf. billets 477, 478), nous nous sommes demandé si les anciens habitants de l’Archipel japonais savaient produire du fer, comme savaient le faire les grandes civilisations du monde telles : l'Égypte des pyramides, l'Inde, la Chine ancienne et l'empire anatolien des Hittites ; quatre foyers d'innovations décisives aux environs des 5000 ans B. P. qui précèdent un peu l’époque homérique (nous nous permettons d’utiliser par commodité l'abréviation B. P : Before Present).  

   Dans notre histoire, on sait que les armes en fer étaient déjà utilisées à l’époque du règne légendaire de l’Impératrice Himiko, qui aurait vécu au IIIe siècle, au temps des tumuli de la fin de l’âge Yayoï (3500-1500 B. P.). On ne sait cependant pas ce qu’était la figure réelle de l’Impératrice ni les conditions exactes de son règne. Le document écrit qui rapporte l’histoire de l’époque provient de la Chine. Ce document historique a pour titre en japonais: Gishi-wajin-den 魏志倭人伝. Rappelons que le Japon antique ne possédait pas l’écriture.

   Pour l’utilisation du fer, il est communément admis qu’elle était commencée dès l’âge Yoyoï. Nous pensons cependant que, dans ce pays, partout volcanique du sud jusqu’au nord, le fer existait depuis l’âge Jômon, même impropre à l’usage normal, comme scorie de lave, fondu grossièrement.

   … …

   La découverte spectaculaire de l’extraordinaire site Sannaï-Maruyama fut annoncée publiquement le 16/07/1994, il y a 27 ans, jour pour jour au moment où nous écrivons ces lignes, à la une de l’édition du soir du quotidien Asahi. À trois kilomètres au nord-ouest de la gare Aomori, ce site à l’extrémité nord du Honshû, est surprenant, d’abord par son étendue (35 hectares), la diversité. Sa richesse des objets retrouvés n'est pas constituée non seulement par des poteries mais aussi des cimetières en état de couches de terre dans un lieu digne, bien rangés par les âges de défunts, et encore par des pierres de fondation qui font imaginer des greniers, plusieurs gammes de statuettes de terre et d’outils d’utilité pratique, tels des engins de chasse (au petit gibier) et de pêche (hauturière et côtière), des pochettes contenant des noix, glands de hêtre ou de chêne, de petits objets pour se parer : bracelets, agrafes, pochettes etc. Il ne s'agit nullement de vies misérables et menacées par la famine, mais, de vies aisées, riches d'un point de vue culturel et vécues au sein d'une communauté sûre et forte.

   On reste étonné devant la taille imposante de pierres de fondation d'une construction sans doute majestueuse (était-ce pour une tour, une grande maison de réception ou un grand atelier couvert) ? Six piliers de bois, d'un rayon de plus de plus d’un demi-mètre, découverts non du côté de la terre intérieure mais vers la côte, laissant supposer qu'elle aurait dépassé de loin un édifice comparable du site Yoshi-no gari (dépt. Saga, Kyûshû), par sa grandeur (haute de plus de 20 m.) et surtout par sa date (ancienne plus de 2000 ans).

   La durée de ces habitats (5500 - 4000 ans B. P.) est extraordinaire. Et tout cela au cours de l’âge Jômon qui précéda le Yayoï !

   À l’époque, le climat doux n’était certainement pas le même qu'à présent. Cette douceur climatique a permis de pratiquer la riziculture. La région souvent victime de la disette, à l'époque contemporaine, avait admis une sorte de colonialisme centrifuge, lors de massives immigrations massives des péninsulaires dans les îles. C'est avec l'adoption de la riziculture que l’âge Jômon prit fin pour de bon.

   Pratiqué d’abord dans le Kyûshû, cet art prit un saut par la mer intérieure (du Japon), jusqu’à Aomori, délaissant le côté pacifique (le Kantô, Nagoya, par ex.) arriéré et privé de cette nouvelle méthode agricole, originaire de l’Asie du sud.

   Cette précocité méthodologique aurait pu favoriser la région nordique. L’empire naissant voulut cependant  conserver cet état afin de contenir la région dans sa zone d’influence. La riziculture devint une technique essentielle du nouvel empire du centre, alors que les confins septentrionaux vivaient principalement de pêche, de chasse et d’élevage. La politique économique du bakufu Tokugawa (époque Édo) garda jalousement pendant 300 ans la riziculture. Sinon, le Tôhoku, notre région, aurait pu vivre un autre destin indépendant du centre.

   La civilisation Sannaï-Maruyama pouvait rivaliser, du moins à son début, par son extention territoriale, avec les quatre civilisations les plus anciennes du monde. Du point de vue de la stabilité (1500 ans sans conflit accompagné de graves destructions), elle peut même prétendre à la première place.    (À suivre)

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