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Philologie d'Orient et d'Occident
4 mars 2014

Le Nord-Est et l'Empire (1)

 

Philologie d'Orient et d'Occident (269)

                                        Le 04/03/2014     Tokyo    K.

L'expansion de la zone aïnou et ses reflux (3)

Le nord-est contre l'empire (25)

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                                               Carthame par Misao Wada

   Le mot à trois syllabes Etouroup: herbe des vallées, délicieuse dans la soupe (cf. billet 268) peut-il être lié au nom de la plus grande des îles Kouriles: Itouroup, Iturup, Etorofu, Etoropo et même Itourpou (une erreur? Torii, Études archéologiques et ethnologiques - Les Aïnou des îles Kouriles, université de Tokyo, 1919, p. 2)?

   Du point de vue de la linguistique indoeuropéenne, toutes ces formes, analysables en Laryn.(V)+C(V)+C(V)[+C(V)], seront susceptibles de plus d'un sémantème. Pour l'étymologie aïnou, ne faut-il pas tenter une tout autre approche?

   Selon Torii Ryûzô (1870-1953), la présence des Aïnou dans l'archipel nippon peut remonter au moins à 6 000 ans BP (op. cit., p. 268). C'est seulement après le décès du savant, à partir des années 60, que d'importantes fouilles qui permettaient de dater les ossements des hommes paléolithiques se sont répétées dans l'archipel: l'Homme de Hamakita (dépt. Shizuoka) censé avoir existé entre 14 000 et 18 000 ans BP, l'Homme de Minatogawa (Ryûkyû), 17 000 ans BP, l'Homme de Yamashita (Ryûkyû), aux environs des 30 000 ans BP. Les Aïnou étaient bien postérieurs à ces paléolithiques mais ils se seraient introduits dans l'archipel bien avant 6 000 ans BP.

   Puisque les plus anciens ossements humains du pays datés des environs des 20 000 ans BP avaient été découverts dans le centre de l'archipel et à l'extrémité sud du territoire actuel nippon, il doit y avoir déjà eu bien avant 6 000 ans BP et en dehors du mouvement aïnou néolithique, une fréquente circulation de populations humaines autour du grand lac intérieur, car à cette époque de glaciation (20 000 ans BP), l'archipel était relié au continent asiatique par le nord et le sud, ce qui faisait de la mer actuelle dite du Japon ou de l'Est (ce dernier terme utilisé par les Coréens) une énorme étendue d'eau en réalité fermée (cf. billet 267 et sa carte).

   Il est donc certain qu'antérieurement plutôt que conjointement avec les actions Aïnou, d'autres peuples du nord se promenaient, aux alentours de la mer intérieure, pour pêcher et surtout pour chasser le renne ou le mammouth - un exemplaire de cette espèce découvert fossilisé aux confins nord du dépt. Nagano, Hokuriku-dô (cf. billet 208). Pour Torii, le plus important des groupes était des Toungouses: «un ensemble de populations venues pour la plupart d'Asie orientale, établies en Sibérie orientale. Les Toungouses occupent les territoires compris entre l'Amour, l'océan Glacial arctique et la mer d'Okhotsk». 

   Cette notice du Grand Larousse (1985) sur les Toungouses modernes, bien insuffisante comme source d'information sur leurs anciennes conditions, ne nous renseigne pas moins sur ce qu'était historiquement ce puissant peuple archaïque. Torii croit à la réalité d'une expédition mythique contre l'Est organisée par le l'Empereur légendaire Jimmu (Koji-ki, cf. billet 135). Dans le pays de l'Est alors régnait un roi au nom de Nagasune-Hiko (nom japonais) qui résista énergiquement à la poussée impériale.

   «Nagasune-Hiko n'était nullement d'origine Aïnou; la conférence qu'il eut avec Jinmou-Tenno le prouve amplement. Nagasune-Hiko était un des descendants des Toungousses [sic] néolithiques établis ici et là en îlots de populations dans le Japon, depuis fort longtemps, [...], tous ces Toungousses [...] étaient vraisemblablement, ou plus civilisés, ou plus avisés, ou simplement plus politiques, à la différence des Aïnou du Yézo, ils finirent par se réunir et ne formèrent bientôt plus qu'un seul peuple, les Yamato, qui s'assimila peu à peu dans le cours des âges, ce qui restait au Japon d'Aïnou et d'Indonésiens, et devint sous le gouvernement paternel et fort de ses Empereurs, ce que nous voyons, le puissant et grand peuple Japonais de nos jours. » (op. cit., Les Aïnou des îles Kouriles, p. 283-284).

   De ses affirmations manifestement nationalistes, dignes d'un homme de Meiji, qui risqueraient d'infirmer sa thèse, je veux retenir néanmoins ce qu'il y a de vraisemblable. Telle présence Toungouse, de tradition orale, en face des Aïnou de la même condition, me semble bien possible au début de l'empire dont l'origine remonterait, selon le savant, bientôt à 2700 ans BP. (À suivre)

 

 

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