Philologie d'Orient et d'Occident (217)
Le 05/03/2013, Tokyo, K.
Deux remerciements:
À Clément Lévy et à Jean-Pierre Levet
Enseigne aux santons de Takayama, par Misao Wada
L'auteur du présent article est bien content de s'être occupé pendant trois ans, de février 2010 en février 2013, de ce blog intitulé un peu dans le vague: «Philologie d'orient et d'occident». Pas un mois n'est passé sans qu'on ait vu publier plus de quatre billets sur son site. On a su tout récemment que ce petit blog tout simple qui ne s'attendait à avoir, tout au début, qu'une dizaine de lecteurs dans le monde francophone, avait fini par attirer l'attention de plus de 12 500 personnes en trois ans. Cela dépasse largement l'attente de l'auteur. Il vous en remercie, francophones.
La préparation de billets en français est devenue une des grandes joies de ma vie. À l'occasion de lancer la seconde série de billets, je veux (me) rendre compte de la raison pour laquelle j'écris en français tout en étant Japonais.
Nombre de lecteurs savent déjà que l'auteur est originaire du nord de l'archipel, ancien territoire des Aïnou. C'est à l'âge de 18 ans (en 1959) qu'il est «monté» à Tokyo, située sur la côte pacifique, à plus de 700 km au sud de sa patrie, grande métropole étrangère, de coutumes, de mœurs et de langue.
Timide et maladroit de nature, il m'a fallu près de 4 ans pour parler convenablement le japonais du centre sans éprouver le sentiment de honte que me valait chaque faute d'accent, de dialectalisme (dont on ne devrait nullement avoir honte) ou chaque expression qui s'écarte de normales citadines. L'apprentissage, d'abord à Tokyo ensuite en France, de la langue française dont l'accent m'a paru plus proche de celui de mon pays que de Tokyo, m'a fait petit à petit surmonter le complexe. La langue étrangère, surtout le français, est une autre vision, une autre sensibilité, voire, un outil de libération.
Le plaisir d'user de la langue française dans la rédaction des billets pour me libérer a été agrandi par la présence d'un coopérateur du nom de Clément Lévy (cf. billets billet 53, 109), agrégé des lettres classiques, détaché actuellement aux Affaires Étrangères comme enseignant à l'université de Naples «l'Orientale». Il m'a appris patiemment et aidé, d'où qu'il soit, à bien manœuvrer l'ordinateur. Non seulement qu'il m'aide avec la mécanique, il prend la peine de s'occuper du contenu: lire toujours le premier brouillon du texte, le corriger et en donner, si nécessaire, son opinion juste et pertinente.
Sa présence attentive est d'autant plus précieuse et agréable qu'on se connaît depuis déjà longtemps. Clément Lévy a été reçu à l'agrégation sous la direction de mon illustre ami helléniste et comparatiste Jean-Pierre Levet (cf. billet 14 entre autres), professeur à Limoges, membre de la section Sciences de l'Antiquité du CNU. Jean-Pierre Levet et moi, nous avons été, en 1966-67, étudiants à Poitiers dans la classe d'occitan de Pierre Bec (cf. billet 119 entre autres).
Sa carrière universitaire commencée à Paris, J.-P. Levet se rapatria définitivement à Limoges, par Poitiers où il alla enseigner plusieurs années au CÉSCM (Centre d'études supérieures de civilisation médiévale). La ville de Limoges est ainsi devenue le lieu de convergence de tous ces fils qui nous liaient. La ville fut également le lieu de refuge, au début de la Guerre, du mois d'août au mois de novembre 1914, pour le grand poète-romancier japonais Shimazaki Tôson (1872-1943). C'est en suivant le conseil de sa logeuse parisienne, Marie Simonet (1857-1946, originaire de Vic-sur-Breuilh, près de Limoges), qu'il se rendit à Limoges, rue de Babylone.
Tout ce concours d'heureux hasards entre la ville du centre-ouest de France et la capitale du Japon favorisa des relations amicales entre l'université de Limoges et l'établissement scolaire qui s'honore d'avoir parmi ses diplômés Shimazaki Tôson.
Je me suis permis, laissant reposer ce blog, de profiter d'une quinzaine de jours de congé que je me suis offert fin février pour aller saluer, à Naples, mon coopérateur qui aida plusieurs années de suite nos étudiants japonais, tout en changeant de ville et de domicile, et Jean-Pierre Levet qui continue de veiller sur eux à Limoges. (à la prochaine le 12 / 03)