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Philologie d'Orient et d'Occident
7 septembre 2011

Le prince Ôama, dompteur de chevaux

Philologie d'Orient et d'Occident (142)
                                 Le 07/09/2011,  Tokyo      k.


Le prince Ôama, dompteur de chevaux



     Au IIIe siècle, la plupart des habitants de l'Archipel ignoraient les chevaux. Un document chinois du IIIe siècle fait état des six animaux faisant défaut, à l'époque, au pays de Yamatai : ovins, bovins, pie, tigre, panthère et cheval (cf. billet 128). On a longtemps débattu du problème de savoir où se situait le pays de « Yamatai ».

     Deux hypothèses traditionnelles sur le lieu de « Yamatai » : l'hypothèse sud (Kyûshû) et la centriste (celle de Kyûshû du nord et celle de la région triangulaire qui englobe trois villes du centre-ouest : Ôsaka, Kyôto et Nara). Plus de 500 km séparent ces deux régions. Une hypothèse n'exclut pas l'autre, car ces deux localités constituaient deux grands centres de civilisation. La vaste région du nord-est est exclue de ces hypothèses.

      On a déja dit que ce serait sous le règne du dixième empereur Sujin (du moment où le terme ten-wau 天皇 « empereur » n'était pas encore en usage) que le cheval est entré dans l'histoire, non pas comme statuette d'argile mais comme véritable monture. Il faut toutefois noter que l'incident survenu au prince Ôhiko-no Mikoto (cf. billet 136) ne se référait, dans une autre version du même épisode, à aucun cheval. Il semble que le prince n'était pas à cheval mais à pied (Nihon-Shoki, éd. Iwanami, 1994, vol. I, p. 286).

     Le palais de l'empereur Sujin n'était pas à Kyûshû, siège du premier empereur Jimmu, mais au centre-ouest. Le déplacement de la cour impériale s'était réalisé pendant la période séparant le premier et le dixième empereur. Selon le Nihon-Shoki (vol. 2, p. 204), le roi du pays de Kudara 百済, péninsulaire, fit don de deux chevaux (étalon et jument ?) au quinzième empereur Wôjin 応神 (IVe siècle).


    Dans l'Archipel, l'élevage hippique se serait d'abord pratiqué à Kyûshû, tout près de la péninsule où la civilisation hippique connaissait un grand essor. Le Nihon-Shoki fait état d'un don au pays de Kudara, sous le règne du 26e empereur Keitai 継体 (début du VIe siècle), de quarante chevaux du pays de Tsukushi 筑紫 (Kyûshû du nord) (ibid. vol. 3, p. 176).
     On voit qu'avec un siècle d'intervalle, le pays produisait déjà des chevaux de qualité. Il faut se rappeler, avec le chiffre 40, qu'au VIe siècle, un bon cheval était un présent équivalent à un petit char d'assaut ou à une automobile de la marque Porsche aujourd'hui.  

     Naoki Kôjirô, un des meilleurs historiens des événements de Jinshin, explique les caractères des troubles dans ces termes:

     C'était, dans cette seconde moitié du VIIe siècle, la première occasion pour les pays de l'Est de surmonter l'hégémonie du palais du centre-ouest. Seulement, le pouvoir du centre était alors divisé en deux. Les pays de l'Est étaient dominés par l'un des deux pouvoirs. Ce n'était pas la puissance propre à l'Est qui gagna. La vraie direction était dans les mains des gens du palais. [...] Mais il est vrai que l'issue de ce conflit de palais dépendait de la force militaire de l'Est (Jinshin-no Ran, Tokyo, Hanawa-shobô, 1961, p. 264).

     À cette mention, le même historien ajoute la note suivante :

     À part cela, c'est la cavalerie qui s'est distinguée dans ces luttes. Elle était surtout remarquable du côté du prince Ôama. On peut supposer que la force militaire des pays de l'Est doit son extension au développement de la cavalerie dans ces mêmes pays. Pour le détail, je le reporte à un autre article. (ibid. p. 270).

     À ma connaissance, Naoki Kôjirô n'a pas encore publié cet article sur la cavalerie de l'Est. Dans l'Archipel, le pouvoir s'est déplacé de l'Ouest vers l'Est. Dans ce déplacement, l'enjeu des chevaux était de taille. Les gens du palais, au fur et à mesure qu'ils prenaient goût à la vie citadine, ont perdu l'habitude des chevaux. Le prince Ôama et ses gens ne s'en étaient pas privés. (À suivre)

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