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Philologie d'Orient et d'Occident
28 juin 2011

Les chevaux et l'empire (5) Les Annales des trois règnes (9)

Philologie d'Orient et d'Occident (131)
                                        Le 28/06/2011, Tokyo       k.


         Les chevaux et l'empire (5)
       Les Annales des trois règnes (9)



     Un autre document historique chinois daté de la première moitié du Ve siècle (Livre de Hòu Hàn 後漢書), suivant la leçon d'un chapitre du Livre de Wèi 魏書 (fin du IIIe siècle), fait état des six animaux absents dans le sud-ouest de l'archipel nippon dont le cheval (cf. billet 128). L'observation du Livre de Wèi à propos de l'absence du cheval au IIIe siècle peut être juste. On ne peut se fier au Livre de Hòu Hàn mettant en relief l'absence de l'animal au Japon du Ve siècle. Dans nos statuettes d'argile (Haniwa) représentant les animaux, le cheval ne fait apparition qu'à partir du Ve siècle, ce qui fait supposer que le coursier y était déjà au IVe siècle.
 
     Ces statuettes (Haniwa) ne sont d'ailleurs que du IIIe siècle, au plus tôt. Le chien, existant dans l'archipel depuis l'âge Jômon, apparut dans l'art (argile modelée) en même temps que le cheval. Il est avéré, cependant, que les grands quadrupèdes comme le cheval ou le bœuf faisaient complètement défaut à l'âge Jômon. On peut le constater, à partir des ossements d'animaux fouillés à Sannaï-Maruyama (site archéologique 5500-4000 BP à Aomori, à l'extrémité nord de Honshû). Le cerf et le sanglier y étaient présents, ainsi que le chien, compagnon de chasse des hommes préhistoriques.

     Le cheval, un animal essentiellement eurasiatique, importé du continent, s'adapta très vite à la vie des insulaires nippons pour s'y imposer rapidement. Le cheval de bât était en même temps un cheval de selle. Cheval de bataille en temps de guerre et cheval de labour en temps de paix, il servait à cultiver les champs de riz, la riziculture ayant déjà été introduite du continent. Le cheval, ce nouveau venu, et le chien, de présence plus ancienne, se firent vite indispensables aux hommes en devenant leurs amis fidèles.

     Après avoir énuméré dans ses Vieux propos recueillis 古語拾遺 plusieurs forfaits contre Dieu dont l'un consistait à écorcher vif le cheval (Kogo-shûï, Tokyo, Iwanami-bunko, 17e éd. 2011, p. 17), Imibé-no Hironari, vénérable maître en rituel impérial, y précisa ses vœux envers l'empereur Heizei (règne 806-809) dans ces termes (ibid, p. 55) :

     Gu-shin Hironari, [...] yowafi sude-ni yasoji-wo koe, kemba (犬馬)-no omofi [...] iyo-iyo setchi-nari. (ibid. p. 55).
     - Moi, Hironari, sujet misérable, dépassant déjà l'âge de quatre-vingts ans, je vous salue, empereur, avec cette affection « chien-cheval » qui va encore grandissant -

     Le cheval, au même titre que le chien, se révélait un symbole de la fidélité.

     D'utilité toujours pratique dans la vie des hommes, le cheval allait se doter d'une dignité morale que lui conférait naturellement son efficacité peu commune, la vertu en étant agrandie par sa noblesse de caractère et de stature. Le rite impérial du passage en revue au nouvel an (le 7 janvier) des chevaux ao (« bleu », employé pour le cheval, le terme ao signifiait du blanc au noir, voire, luisant. cf. billet 127) rendait compte d'une sacralisation de l'animal qui était en train de s'achever.

     L'année 859.
     Le 3 août (en ancien calendrier). De grandes pluies.
     Le 7 août. On convoqua au palais de l'Est soixante bonzes pour leur faire effectuer trois jours durant une récitation collective du sûtra (pour conjurer le mauvais temps qui sévissait). 
     Le 8 août. Un tremblement de terre.
     Le 9 août. La pluie ne cessait toujours pas depuis mai. Souhaitant l'arrêt immédiat des pluies continuelles, l'empereur recourut à un temple (雨師社) spécialement prévu pour cela, au pays de Yamato, et y expédia un messager muni d'un billet de vœux écrits et de l'offrande d'un cheval blanc (ao-uma) (Sandai-Jitsuroku. Annales des trois règnes, Kyoto, Rinsen, 1986, p. 61).

     Selon les Vieux propos recueillis (p. 144), on pouvait calmer la colère bleue du dieu de la Récolte en lui faisant don de trois animaux blancs : un sanglier, un coq et un cheval.  (À suivre)

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