Nishiwaki le visionnaire
Philologie d'Orient et d'Occident (58)
Le 01/09/2010, Tokyo K.
Nishiwaki Junzaburô, le «visionnaire» (12)
Les Prolégomènes aux littératures anciennes "Kodai-bungaku Josetsu" (Tokyo kôgakusha, 1948), c'est un petit volume à l'aspect minable, imprimé dans du papier louche. La couverture de couleur brun-foncé, sans aucun apparat. On peut imaginer quelles étaient les conditions de production des imprimeurs du pays qui venait de se sortir de la catastrophe. L'auteur n'aurait pas eu le temps de réviser ses épreuves. L'apparence du livre n'accuse que la pauvreté, tandis que sa teneur représente une richesse inestimable.
Le livre se compose, hormis la préface et la conclusion, de 29 chapitres regroupés en 7 sections, qui, à leur tour, sont réparties en deux grandes divisions : la première, les hommes primitifs en cinq sections (21 chapitres, en 200 pages environ), la seconde, les hommes du Moyen Âge en deux sections (8 chapitres, en moins de I00 pages). Voici la composition du livre.
Première division : L'homme primitif
- Préface -
Première section : Le monde de l'art magique
Premier chapitre : Le monde des dieux
Second chapitre : Le monde de l'art magique
Troisième chapitre : Pensées primitives
Seconde section : La vision de la vie
Premier chapitre : Le règne de Dieu
Second chapitre : La fatalité et la ruine
Troisième chapitre : La douleur
Quatrième chapitre : Le combat
Cinquième chapitre : L'errant
Troisième section : La laïcité
Premier chapitre : Le roi de l'art magique
Second chapitre : Le roi politique
Troisième chapitre : L'homme d'armes
Quatrième chapitre : La femme
Cinquième chapitre : funérailles, vin, jeux, saisons
Quatrième section : Rites et arts
Premier chapitre : La littérature des prêtres
Second chapitre : La littérature des sibylles
Troisième chapitre : La littérature des sages
Quatrième chapitre : La littérature des poètes
Cinquième section : La signification primitive des arts
Premier chapitre : Récits
Second chapitre : Chants
Troisième chapitre : La vie du pays d'Islande
Quatrième chapitre : L'art des poètes
La seconde division : L'homme du Moyen Âge
Première section : La vision générale de la vie
Premier chapitre : La vision de la vie laïque
Second chapitre : La morale des paysans
Troisième chapitre : La vision philosophique de la vie
Quatrième chapitre : La vision de la vie dans la littérature romaine
Cinquième chapitre : La théorie astrologique des fatalités
Seconde section : La vision des poètes de la vie
Premier chapitre : La vision comique de la vie
Second chapitre : La vision tragique de la vie.
Troisième chapitre : La vision romantique de la vie
- Conclusion -
A ce schéma des Prolégomènes, il faut ajouter un détail important. Sa thèse est sous-titrée par : - Gen'ei-no hito - "Le visionnaire". Le sous-titre symbolique, assez rare dans ce genre de livre, semble signifier que sa thèse n'était pas un simple ouvrage d'érudition mais une œuvre poétique. Malgré l'opinion du critique Shinoda Hajime qui a placé les travaux scientifiques de Nishiwaki en dehors de ses inspirations poétiques (cf. billet 55), je suis plutôt d'avis que c'est cet ouvrage qui nous procurera la clé pour la boîte de bijoux poétiques de Nishiwaki et surtout le moyen de percer le mystère de l'engouement qu'il a montré, sur le tard, pour la comparaison gréco-chinoise.
Pour la préface du recueil "Le voyageur n'est pas de retour" (1947), il reprend l'idée du visionnaire, mise au début des Prolégomènes : En moi se blottissent plusieurs personnes. D'abord, un homme moderne et un homme primitif. [...]. Un autre homme s'y tapit. Ce dernier tient du mystère de la vie, de l'univers éternel ? Ni la raison ni la passion ordinaires n'arrivent pas à le comprendre, à l'élucider. [...]. Je le nomme « visionnaire » et le prends pour voyageur éternel. [...] Ce serait un souvenir miraculeusement conservé de l'homme antérieur au primitif. (ibid.). Voilà qui est dit. Il cherche dans lui-même un souvenir de ce qu'il était dans un temps immémorial. Ce souvenir, n'est-ce pas le poète lui-même ? (A suivre)